Hymne à la viande : le film Steak (R)évolution

Depuis la rentrée, la viande est sur tous les fronts. Dans les librairies avec la parution de deux livres sur la place des animaux dans notre société, celui du moine bouddhiste Matthieu Ricard et celui du journaliste Franz-Olivier Gisbert.

Dans la rue avec la semaine « Made in Viande » organisée par Interbev.

Sur les écrans avec la sortie le 5 novembre du film « Steak (R) évolution » de Frank Ribière.

Et à l’Assemblée Nationale qui vient d’adopter une modification du code civil reconnaissant à l’animal sa qualité « d’être sensible ».

À l’évidence la société se pose beaucoup de questions sur la consommation de viande, sur la place respective des hommes et des animaux dans notre univers et sur les conditions d’élevage et d’abattage des animaux. C’est une belle occasion pour les professionnels d’expliquer leurs pratiques, les faire évoluer et les modifier lorsqu’elles sont critiquables.

Et si « Steak (R)évolution » avec sa quête du meilleur steak dans le monde nous donnait un fil conducteur des réponses à apporter ?

Les nombreux articles de presse sur ce film le présentent comme un hymne à la très bonne viande, synonyme de plaisir, de partage et de convivialité qui met l’eau à la bouche du spectateur. Après l’avoir vu, vous n’avez qu’une envie : c’est de partager et de dévorer une bonne entrecôte. L’homme a bien un goût inné de la viande, imprimé dans ses gènes par l’histoire de son évolution.

Le tour du monde auquel invite « Steak (R)évolution » confirme l’universalité de la viande, dans les cultures et les pratiques alimentaires. De l’Argentine au Canada, de la Suède à l’Espagne, de l’Ecosse au Japon, la viande est bien présente dans toutes les gastronomies et dans la diète quotidienne des hommes alors même que les croyances philosophiques ou religieuses diffèrent sur la hiérarchie des êtres vivants.

Cette universalité se retrouve aussi dans la convergence des critères de qualité d’une bonne viande. C’est d’abord une chaîne humaine associant un éleveur, un boucher et un cuisinier. L’éleveur va s’attacher à mettre en valeur les qualités des différentes races – toutes les races ont leurs qualités et aussi leurs défauts – et surtout assurer une finition qui donne une viande avec du « bon gras ». Ensuite les opérations s’enchaînent : abattage sans stress, découpe, maturation et enfin cuisson. Et le film montre toute l’attention et la passion que chacun des acteurs apporte à son travail pour amener dans l’assiette un produit excellent, voire exceptionnel.

Une bonne viande est donnée par un animal bien traité, « heureux ».

Les acteurs du film montrent qu’on peut tout à la fois aimer les animaux, en prendre soin et aussi les tuer pour manger leur viande.

« Cette viande “haute couture” ouvre la voie à la viande de tous les jours, la viande “prêt-à-porter” avec les mêmes critères de qualité : une viande mûre, bien finie avec suffisamment de gras et bien maturée. Les professionnels connaissent tous ces fondamentaux, les appliquent parfois mais restent frileux quand il s’agit d’informer le consommateur.

Certes, « Steak (R)évolution » présente des viandes « haute couture », exceptionnelles par leurs qualités, par leurs prix et par les occasions de les consommer. J’ai eu la chance de déguster un asado en Argentine, une picanha au Brésil, du bœuf de Kobé au Japon ou de dîner chez Peter Luger à New York, ce sont bien des moments exceptionnels. Mais cette viande « haute couture » ouvre la voie à la viande de tous les jours, la viande « prêt-à-porter » avec les mêmes critères de qualité : une viande mûre, bien finie avec suffisamment de gras et bien maturée. Les professionnels connaissent tous ces fondamentaux, les appliquent parfois mais restent frileux quand il s’agit d’informer le consommateur.

Pour preuve : les nouvelles dénominations des viandes vendues en libre-service applicables dès 2015 et qui ne font aucune référence à l’état d’engraissement et à la maturation.

Encore une occasion manquée !

Le film ouvre bien d’autres débats : herbe ou céréales ? Races anglaises ou races continentales ? Et les propos passionnés, parfois excessifs, d’Yves-Marie Le Bourdonnec peuvent être discutés. Les viandes servies chez Peter Luger viennent de jeunes bœufs finis avec une ration de céréales, le bœuf de Kobé bénéficie d’un régime hyper énergétique. De tous temps la finition des bovins pour la viande a fait appel à un régime riche en céréales ne serait-ce que pour obtenir une viande suffisamment grasse, mais l’essentiel est de leur offrir une vie au pâturage, conforme à leur qualité d’herbivores ruminants. Chaque race présente ses propres qualités et c’est tout le savoir-faire et les bonnes pratiques des éleveurs, y compris des éleveurs français, qui vont en faire de la bonne viande.

Matthieu Ricard, Franz-Olivier Gisbert et d’autres nous accusent de violence, d’un manque de bienveillance envers les animaux. Nous avons lu leurs livres. Ont-ils seulement vu ce film ?

René Laporte

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